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Portraits des coopérateurs de Nouvelle-Aquitaine
Publié le 13/11/2025 dans Actualité réseau
L’éco-construction : une affaire collective chez Habitat Éco-Action Depuis la création en juillet 2014 de la société Habitat Éco-Action, la promesse est claire : entreprendre autrement.
Dans cette Coopérative d’Activité et d’Emploi (CAE), les entrepreneurs du bâtiment deviennent salariés, sans pour autant perdre leur indépendance.
La coopération pour propulser l’éco-habitat
Au moment de lancer la coopérative en 2014, le secteur de l’éco-habitat n’est pas aussi développé que de nos jours. Après maintenant plus de dix ans d’existence, Habitat Éco-Action (HEA) est devenu la référence dans le secteur de l’éco-construction et de l'éco-rénovation sur le territoire sud-aquitain. “Nous sommes presque l’unique acteur identifié” confirme Cyrille Hvostoff, co-gérant de HEA depuis 2022.
Composée de plus de 70 entrepreneurs associés, la structure implantée à Tarnos et à Laroin, propose des services d'ingénierie et de construction dans l’éco-habitat. Tous les professionnels disposent de certifications qui valident leur engagement écologique.
Les coopérateurs partagent une vision commune de leur métier et de l’impact qu’ils souhaitent avoir sur la société, comme le confie Cyrille : “après plus de 20 ans en tant qu’électricien du bâtiment, me consacrer à l’éco-construction et l’éco-rénovation était pour moi une évidence. C’est une façon d’être aligné avec mes valeurs écologiques sans être militant. On propose une manière d’agir différente.”
Habitat Éco-Action a privilégié le modèle de la CAE, Coopérative d’Activité et d’Emploi. En France, ils ne sont encore que 155 à avoir choisi ce statut* qui permet “d’entreprendre pour soi dans une entreprise partagée”.
Pour Cyrille, “la proposition faite à un professionnel du bâtiment, c’est de pouvoir se lancer en ayant un collectif derrière, d’avoir un accompagnement de l’équipe d’appui mais pas seulement. On intègre un réseau. C’est un sacré accélérateur.”
Pour les clients, l’organisation des corps de métiers du bâtiment en CAE s’avère être tout autant bénéfique. Faire appel à Habitat Éco-Action, c’est pouvoir compter sur la synergie de ces entrepreneurs qui se connaissent bien, qui évoluent ensemble et s’échangent les bonnes pratiques.
L’intérêt collectif comme boussole
La CAE Habitat Éco-Action s’est constituée en SCIC : en Société Coopérative d’Intérêt Collectif. La vocation d’utilité sociale fait partie intégrante du projet. Consolider l’emploi local, privilégier les filières d’approvisionnement du territoire, développer l’éco-habitat sont autant de missions portées par la coopérative.
Elle joue aussi un rôle de sensibilisation sur leur territoire, notamment avec la co-organisation d’événements ouverts à tous: “Faîtes de l’éco-habitat”. L’idée ici est de faire rayonner leur pratique au-delà des chantiers.
L’intérêt collectif prédomine au sein-même de HEA notamment par une transparence voulue et appliquée à tous les étages.
Stéphane Vende, co-gérant de HEA depuis lui aussi 2022, précise : “dans notre structure, on doit tout dévoiler. La transparence est cruciale même s’il y a des moments où ça bouscule tout le monde mais c’est nécessaire. Avec le recul, je me dis que c’est assez précieux.”
La transparence est donc de mise dans la gestion de la société mais aussi dans le partage des ressources, entre professionnels du bâtiment : “Il y a quelque chose d’assez puissant dans le modèle” avoue Cyrille.
“Nous avons choisi de partager nos données avec d’autres CAE du bâtiment. On s’autorise à dire que telle ou telle pratique marche ou ne marche pas.”
Ces données sont partagées avec d’autres CAE du bâtiment. “L’information circule de manière libre. On se voit trois fois par an, on échange des outils, des données, des statistiques, des bonnes pratiques etc. Cette liberté de partage, elle est vraiment liée aux coopératives. Quand les entreprises conventionnelles sont en difficulté, elles ne le font pas savoir. Nous, on a ce petit plus entre coopératives.”
Stéphane confirme : “ça a permis des collaborations avec d’autres entreprises à vocation sociale. On profite de tout l'écosystème autour de la coopérative.”
Un modèle pourtant trop peu connu
Le monde du bâtiment peut faire preuve d’inertie. Le modèle de la CAE n’est pas encore assez connu. Cela demande donc beaucoup de travail de présentation, parfois très chronophage reconnaît Cyrille. “Ça nous demande de nous justifier beaucoup plus que les autres, à chaque fois, on doit gagner en légitimité, plus que nos confrères.”
“Notre fonctionnement pose toujours question. Mais l’intérêt de se regrouper est vite compris et reconnu” confesse Stéphane.
La gouvernance partagée bien installée
Dans les dossiers ouverts chez HEA, celui de la croissance est soumis à discussion. “Une question nous préoccupe sur l’étendue de notre activité : doit-on grossir ? Sur quel territoire ? Quels sont nos plafonds de verre ? Nous avons opté ensemble pour que la coopérative investisse le territoire des Landes” révèle Stéphane.
Cette gouvernance partagée, avec en tête de proue, l’équipe dirigeante tricéphale composée de Cyrille Hvostoff (salarié de l’équipe d’appui), Stéphane Vende et Benjamin Val (tous deux sont des entrepreneurs salariés), apporte une stabilité à la coopérative, qui affiche un chiffre d'affaires de 4 millions d’euros annuel, depuis maintenant quatre années consécutives et ce malgré les crises sanitaire et énergétique.
Pendant les premières années de vie de la SCIC, Pierre Driollet a construit et a mené la barque. Après deux mandats, il a choisi de passer le relai. D’abord, des élections sans candidat ont conduit à une première co-gérante, qui n’a pas su endosser son rôle pleinement.
Un an après, de nouvelles élections sont organisées, avec candidats cette fois-ci. Le trio prend les rênes de Habitat Éco-Action en 2022, pour un premier mandat.
Stéphane apprécie particulièrement le partage de la responsabilité dans cette répartition du pouvoir : “le côté positif d'être à trois, c’est de partager et d’être soutenu à chaque décision et à chaque idée. C’est confortable. Chacun va apporter quelque chose.” Il souligne aussi l’envers du décor. Quand une de ses idées ne trouve pas écho dans le groupe, il peut ressentir une certaine frustration, “vite oubliée”, précise-t-il.
Propos recueillis par :
Lucie Pezavant
Associée de Cosme - Collectif coopératif de freelances
