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PORTRAITS des coopérateurs de Nouvelle-Aquitaine
Publié le 03/07/2025 dans Actualité réseau
“Nous nous devons d’entretenir cet héritage culturel vivant”, affirme Ludovic Nouaille, coopérateur depuis 15 ans.
Préserver le patrimoine culturel : une noble responsabilité
Réhabiliter les bâtiments de notre patrimoine national ne s'improvise pas. La SCOP Blanchon compte 55 salariés, tous dotés d’un savoir-faire précieux que l’actuel PDG Ludovic Nouaille s’emploie à préserver à tout prix.
La puissance de la marque Blanchon
La société Blanchon, née en 1931 à Limoges, se distingue des autres entreprises du BTP de par son terrain de jeu et sa spécialité : la restauration et la réhabilitation des édifices du patrimoine culturel. “Quand on vient chez Blanchon, on vient pour travailler sur des bâtiments du patrimoine en maçonnerie, en pierre de taille, en charpente, en couverture ou encore sur des menuiseries d’époque” précise le dirigeant.
C’est précisément l’utilisation de matériaux anciens au moyen de techniques ancestrales qui font de Blanchon une entreprise si singulière.
Protéger ces corps de métier rares
Le premier acte de préservation s’est joué lors de la création de la coopérative, en décembre 2010. Si la société a été fondée par Albert Blanchon il y a presque un siècle, elle n'est organisée en coopérative “que” depuis 15 ans.
En 2010, le dirigeant en place décède en très peu de temps. La société se trouve alors sans gérance pendant huit longs mois. A l'issue de cette période de transition, la veuve du PDG choisit elle-même de vendre la société aux salariés, réunis par Didier Bayle, alors dirigeant de L’Atelier du Vitrail, autour d’un projet coopératif.
Face à cette initiative collective, d’autres propositions sérieuses voient le jour. Seulement voilà, seule l’option SCOP assure le maintien de tous les corps de métier dans l’entreprise et par là même, la pérennisation des savoir-faire.
15 ans après, c’est toujours cette ligne directrice qui guide Ludovic Nouaille dans ses prises de décisions.
Assurer la continuité des missions
Sans fausse modestie, les collaborateurs savent qu’ils oeuvrent pour conserver le patrimoine bâti et les monuments historiques. “Nous nous devons d’entretenir cet héritage culturel vivant” assure le dirigeant.
Ce qui rend unique la SCOP Blanchon, c’est aussi son territoire. “Chaque région, en fonction des roches et de la nature des sols, a développé une gamme de compétences propres. Ici, dans le Centre de la France, nous travaillons le calcaire, le granit, la lave. C’est notre spécialité. Vous ne trouverez nulle part ailleurs les bardeaux de châtaignier de la Creuse ou les ardoises corréziennes.”
Comment faire alors pour que ces précieuses techniques ne se perdent pas ? Ludovic précise : “d’abord, entre nous, de façon informelle, nous partageons énormément. Nous montons aussi des formations pour l’ensemble de nos salariés, à Limoges, Angers et Avignon. Nous avons aussi la chance incroyable de pouvoir nous appuyer sur de nombreuses archives qui remontent à 1950 !”
Une ressource considérable qui leur permet de perpétuer des savoir-faire ancestraux.
Bien entendu, chez Blanchon, l’apprentissage occupe une place importante, et ce quel que soit le niveau de diplôme. “On a une dizaine d’apprentis du CAP jusqu’au diplôme d’ingénieur. Nous sommes aussi partenaires des Compagnons du Devoir” indique Ludovic.
L’engouement post-Covid pour les métiers du bâtiment a été pour lui de “la poudre aux yeux”. Il a accueilli des gens sur les chantiers pour les plonger dans la réalité du métier. “Beaucoup de ces personnes idéalisaient notre quotidien. Mais le travail d’ouvrier est très physique, reste dur, que l’on travaille sur une église ou sur un bâtiment neuf !”
Investir pour ne pas mourir
Pour assurer la protection de ces savoir-faire singuliers qui font la particularité de l’entreprise Blanchon, Ludovic Nouaille a bien en tête l’importance d’avoir une vision. “Quand on n’investit pas, on meurt”, affirme-t-il. “Depuis 15 ans, énormément de choses ont changé dans notre entreprise.”
Au début de l'aventure, Blanchon évoluait dans des locaux vétustes, loués à la veuve de l’ancien PDG. Très vite, la nécessité de construire un bâtiment neuf s’est faite ressentir et après validation en assemblée générale, le projet a été adopté.
Ils ont commencé par acheter le terrain en 2015 jusqu'à pouvoir poser leurs cartons en 2020 dans de nouveaux espaces. La surface disponible est aujourd’hui doublée par rapport à 2010.
L’autre grand chantier s’est concentré sur le renouvellement du matériel, qui en avait grand besoin : “nous avons lourdement investi à partir de 2015, 2016” précise le PDG.
Enfin, pour ne plus avoir à sous-traiter ou à louer des échafaudages, Blanchon a internalisé cette activité en 2015.
“Ça ce sont les changements que nous avons opérés pour la partie technique. Pour le reste, on a ouvert nos chakras, pour travailler dans l’ère du temps” confie Ludovic.
“Avec l’ancienne direction, les marchés publics représentaient 95% de notre activité. Aujourd’hui, nous avons diversifié nos activités pour ne plus être dépendants des appels d'offres. En 2025, 60% de nos contrats sont dédiés aux marchés publics et 40% aux chantiers privés.” Ludovic précise que son objectif est d'arriver à une répartition égale dans les prochaines années.
Une stratégie de diversification qui permet à la SCOP Blanchon de “se prémunir des périodes moins fastes”, explique le PDG.
Sans renier l’ADN de l’entreprise, fondé sur le patrimoine bâti et les monuments historiques, ces nouveaux chantiers auprès de particuliers se concentrent sur des maisons en pierre de taille, aux menuiseries anciennes, là où le savoir-faire singulier de Blanchon peut aussi pleinement s’exprimer. “Pour moi, il n’y a pas de petits et de gros clients. Notre but est de n’en laisser aucun de côté, on ne fait pas de différence” souligne Ludovic.
Quand le PDG regarde vers l’avenir, il se met volontiers à rêver à un monde où les politiques publiques seraient plus ambitieuses dans la préservation des monuments de notre territoire. “Le chantier de Notre-Dame était exceptionnel. Il faudrait qu’il y en ait plus de cette envergure.”
Propos recueillis par :
Lucie Pezavant
Associée de Cosme - Collectif coopératif de freelances